L'économie wallonne vue d'un vaisseau spatial, c'est 0,2% du Produit intérieur mondial. Une poussière dans la mondialisation. Dans l'Union européenne des Vingt-Sept, cela ne pèse pas lourd non plus. Un mouchoir de poche encastré dans les zones d'influence de l'Allemagne, de la France et des Pays-Bas, sans compter la Flandre. Siège historique de l'industrialisme d'une Belgique qui a compté parmi les poids lourds de l'essor des nations européennes, la Wallonie a quelques raisons de s'interroger sur son avenir économique depuis, mettons, la Seconde Guerre mondiale, époque où son outil commence à vieillir. Là, d'évidence, on a sorti une loupe.
Ce qui doit frapper, sous une loupe, est le coup de barre donné depuis 2005 pour redynamiser le tissu économique wallon. À eux seuls, les chiffres impressionnent. Le premier « plan Marshall » de stimulation économique, 2005-2009, injecte un milliard et demi d'euros (60 milliards dans nos anciens francs) et le second, qui prend la relève en visant l'horizon 2014, presque autant. Une pluie de dollars pour parler en langage hollywoodien.
Forcément, cela doit donner des résultats. Forcément ? Deux problèmes vont surgir. Le premier tient à la nature même de cette manne qui, en bénéficiant à tout ce que la Wallonie compte d'agents économiques, universités incluses, ne laisse que peu d'espace à la critique. On ne peut à la fois être l'obligé du Prince et son contempteur. Le second tient à l'état désolant de l'appareil statistique. En 2009, l'organe désigné pour évaluer les retombées des aides publiques en faveur des entreprises accordées dans le cadre du premier plan Marshall a procédé... par entretiens téléphoniques, et encore, en sous-traitant le travail. L'économie est affaire de chiffres mais on ne chiffre pas.
Difficile, donc, de porter un jugement. L'installation d'un centre de stockage informatique sur 85 hectares à Saint-Ghislain par Google a fait grand bruit. Investissement de 250 millions d'euros largement aidé par des moyens publics. Mais on cherche le fil conducteur. Cette politique industrielle a permis de créer 120 emplois, « la plupart wallons » laisse-t-on entendre évasivement. Pour apprécier, il y aurait lieu de les comparer aux 1 200 emplois de la FN Herstal et aux 11 700 du Port de Liège, et sur cette base détecter les éléments de cohérence. Ce qui en tient lieu et qui cimente, dans le plan Marshall, est la volonté d'attirer l'investissement étranger, en jouant sur une offre généreuse de terrains, d'incitants financiers et, sans doute, réseau universitaire aidant, d'un potentiel en main-d'oeuvre qualifiée.
Ce dossier comporte les articles suivants :
- Un plan qui a le mérite d'exister (Stéphane Balthazar)
- Le plan Marshall est-il durable? (Anne De Vlaminck et Muriel Ruol)
- Satisfaisant mais peut mieux faire (Michel Paquot)
- De Marshall à Marshall et au-delà (Francis Bismans)
- Une application à la lettre de la stratégie de Lisbonne (Henri Houben)
- Stimulation économique = politique de crédit (Xavier Dupret)
- Plan Marshall : une politique économique du 3è type? (Eric Rydberg)